2001
Cairn
Jacques Marseille, « Nouvelles lectures sur les avenirs flous de la longue crise », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, ID : 10670/1.tt9pkr
Les historiens ne sont pas prophètes, mais les indices économiques, attentivement scrutés, permettent d’anticiper des tendances. Du point de vue économique, la crise a rendu crédibles trois scénarios : le capitalisme sauvage, le New Deal, le socialisme autogestionnaire. Il n’est pas sans intérêt de réfléchir à la façon dont les contemporains percevaient ces choix. Le socialisme, dans les années 1980, restait crédité, par les experts américains eux-mêmes, d’une forte capacité de résistance ; la sauvagerie du capitalisme, dépeint hier avec horreur par Dickens et aujourd’hui par Viviane Forrester, réserve quelques surprises, puisque l’on constate une décrue des inégalités et une élévation des niveaux de vie ; le New Deal, anticipé avant 1914 par les réformes sociales de Bismarck et de Lloyd George a eu du mal à s’installer en France, la démocratie de petits propriétaires ne s’accommodant pas de ce qui était ressenti comme une ingérence de l’État. Ces regards rétrospectifs invitent à se montrer prudents dans la formulation des pronostics. On peut cependant imaginer qu’un New Deal inédit s’ébauche, caractérisé par un retrait de l’État, désormais concentré sur quelques missions, et un nouveau partage du temps de travail. Telle est, du moins, l’hypothèse la plus plausible.