2016
Cairn
Monica Heintz, « Chapitre 3. Principes éthiques a priori et justifications a posteriori », Journal international de bioéthique et d'éthique des sciences, ID : 10670/1.vgaaqc
Si l’être humain dans son intégralité biologique est le même partout, comment concevoir que les principes éthiques des soins qui lui sont prodigués puissent être si différents? Les anthropologues admettent que la diversité des cultures va de pair avec la diversité des principes moraux et donc que dans une société pluriculturelle l’individu peut référer à des cadres moraux différents pour expliquer son propre positionnement en tant qu’individu en demande de soins. Mais comment déceler, à travers la prise de parole qui suit et justifie l’action, quel était ce cadre moral ? Dans la plupart des sociétés où plusieurs systèmes éthiques coexistent on observe une hiérarchisation non avouée (résultante d’un rapport de pouvoir) qui fausse les justifications a posteriori des acteurs. De plus, les anthropologues envisagent encore difficilement que le comportement individuel soit souvent, non pas un reflet de principes moraux en pratique, mais une négociation permanente entre les cadres moraux disponibles dans la société et les désirs et expériences individuelles. Cette réticence est certainement due aux difficultés de rendre compte d’une complexité et d’un dynamisme qui ne semblent pas faire système. L’impact de l’expérience individuelle sur la manière de recevoir ou de prodiguer les soins peut être faiblement relié à une référence à un système moral, même si cette référence apparait dans la justification a posteriori de l’action.