22 mars 2024
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/2534-7535
info:eu-repo/semantics/openAccess , https://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/
Emilia Ndiaye, « Les eaux comme frontières dans les Enfers gréco-romains, d’après L’Odyssée d’Homère, la Théogonie d’Hésiode, La République de Platon et L’Énéide de Virgile », Frontière·s, ID : 10670/1.wc139z
Les eaux sont omniprésentes dès l’entrée des Enfers gréco-romains, et plusieurs fleuves organisent la topographie des lieux en divers espaces séparés. Ils représentent une frontière géographique qui, dans l’organisation verticale du monde selon Hésiode, marque la limite entre la surface terrestre des vivants et l’inframonde des morts : ainsi, dans L’Odyssée, le confluent des deux fleuves, au bord de l’Océan, marque l’entrée des Enfers pour Ulysse, tandis que c’est le lac Averne pour Énée dans L’Énéide de Virgile, ou encore le Styx et son marais que les morts franchissent dans la barque de Charon. Une fois dans le royaume d’Hadès, des fleuves y délimitent plusieurs zones. Le Pyriphélégéton, « fleuve de feu », enserre le Tartare, renforçant la séparation entre les criminels qui y sont enfermés et les autres ; l’Amélès dans la plaine du Léthé, symbolise une frontière temporelle entre le passé et l’avenir, en procurant aux âmes l’oubli de leur vie passée avant leur réincarnation, selon les mythes platoniciens du Phédon et de La République. Nous envisagerons, dans une perspective diachronique, les différentes formes de frontière que sont les eaux infernales dans ces textes littéraires antiques : frontières symboliques dont la fluidité recèle une ambiguïté fondamentale – celle de l’eau, élément à la fois de vie et de mort –, en séparant, mais aussi autorisant, voire favorisant, transitions, passages et circulations, en particulier entre réel et imaginaire.