Il faut parier : Locke ou Pascal ?

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2011

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Le pari de Pascal a pu être tenu au xviiie siècle pour un argument qui n’atteint sa pleine valeur démonstrative que chez Locke, dans un passage de l’ Essai philosophique concernant l’entendement humain (II, XXI, § 70) portant sur la nécessité de préférer la vertu au vice dès que l’on considère la possibilité d’une éternité de vie future. Cette interprétation n’a pas de réel fondement. L’argument du pari souligne la différence entre les exigences de la raison aléthique et celles de la raison pratique : il faut reconnaître dans le pari un acte, non une proposition. La combinaison entre la comparaison d’une unité (ma vie ante mortem) et d’une multiplicité (d’autres vies possibles post mortem) et les chances de réussite ou d’échec du pari en faveur de l’existence de Dieu permet d’assigner les conditions de rationalité de cet acte : l’absurdité qu’il y aurait à parier contre l’existence de Dieu se déduit d’une double infinitisation, quantitative (une infinité de vies) et qualitative (en chacune, une infinité de bonheurs), du second membre de la comparaison. Il en va tout autrement dans l’argumentation de Locke. Regarder isolément le § 70 de l’ Essai II, XXI comme une démonstration autosuffisante, qui contiendrait en elle-même la clé de sa compréhension, revient à en proposer une lecture faussée. Un examen attentif de l’ensemble de ce chapitre XXI fait apparaître au contraire que la thèse d’un perfectionnement dans l’ Essai du pari de Pascal, ou même d’une simple équivalence entre les Pensées et l’ Essai, se trouve invalidée par la fonction véritablement dévolue par Locke à son argument propre, au terme d’une enquête sur le principe de la détermination de la volonté dont je m’efforce ici de reconstituer toute la complexité.

Pascal’s wager was sometimes viewed in the eighteenth-century as an argument conquering its whole demonstrative force not in the Pensées but in a passage of Locke’s Essay Concerning the Human Understanding (II, XXI, § 70) dealing with the preference to be given to a virtuous life when considering the possibility of another eternal life. In this paper, I intend to show that this interpretation is ill-founded. The argument of the wager highlights the discrepancy between the requirements of alethic reason on the one side and of practical reason on the other side: the wager is to be seen not as a proposition, but as an act. When emphasizing the conditions on which this act can conform to rationality, the argument used of in the Pensées puts the comparison between a unity (my life ante mortem) and a multiplicity (other possible lives post mortem) on the front of the stage, in combination with a reckoning of the chances of winning or losing the bet on God’s existence. The reduction ad absurdum of the act of betting against God’s existence is deduced from a double infinitization, not only quantitative (an infinity of lives), but also qualitative (a reiterating infinity of happiness) of the second member in the comparison. Now, the case is different in Locke’s argumentation. Its reading is vitiated if we deem that the § 70 in the Essay II, XXI consists in a self-sufficient demonstration, understandable by itself. Through a close examination of the chapter XXI in its entire, it appears on the contrary that the thesis of an alleged improvement or even of a mere equivalent of Pascal’s wager in the Essay is defeated by the necessity to put back Locke’s own argument in its true place, actually as the result of a complex enquiry on the principle of the determination of the will.

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