Les objets océaniens « tardifs » et leur muséalisation : un enjeu

Résumé Fr

Parmi les productions matérielles des populations océaniennes, se trouvent des objets souvent considérés comme « tardifs », « récents », revêtus de qualificatifs plus ou moins péjoratifs, comme « curios », voire « décadents ».Il convient en réalité, de s’interroger sur ces objets, témoins du XIXe siècle et du début du XXe, période d’un grand dynamisme historique. Perçus par les esthètes ou scientifiques occidentaux comme des objets dénaturés, vides de substance magique car créés pour être échangés avec les voyageurs de passage, et donc indignes d’intérêt, ils n’en restent pas moins les témoins de sociétés qui sont alors aux prises avec les cataclysmes des épidémies, des endoctrinements religieux, des politiques coloniales coercitives et de leurs conséquences. Ils ne rendent donc pas tant compte de traditions mourantes et « abâtardies » dont ils seraient une sorte de dernier souffle, que de la résilience et de l’agentivité des populations d’Océanie, qui incorporent alors de nouveaux outils, de nouveaux modes de représentation, de nouveaux savoir-faire et qui s’intègrent dans une économie à l’occidentale. En ce sens, ils sont les témoins matériels des capacités de réactivité et de recomposition des sociétés insulaires. Ainsi, la prise en compte de leur intérêt, de même que leur muséalisation, sont aujourd’hui indispensables. L’intégration des objets tardifs – que les Occidentaux ont souvent dénigré –, aux expositions permanentes peut être un moyen de renouveler le regard du visiteur, regard où une certaine esthétique, critique et peut-être prétentieuse, a longtemps prévalu.