15 juin 2023
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Laurence Benarroche, « Si loin, si proche – du Yiddishland au Nouveau Monde. Shoah et judéité dans les écrits de Jonathan Safran Foer, Nicole Krauss et Daniel Mendelsohn. », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.x0l3ye
Les écrits de Foer, Krauss et Mendelsohn participent au renouveau de l’écriture de la Shoah et appartiennent à une même veine : produits par des petits-enfants américains de survivants ou de contemporains de la Shoah, leur parution concomitante n’est pas un hasard. Pour ces Américains juifs d’origine polonaise ou ukrainienne, la Shoah sert de lien entre le Vieux Continent et le Nouveau Monde : ils représentent la "génération passerelle", la dernière qui aura connu et approché des survivants et qui se doit de transmettre leurs témoignages. Dans leurs écrits, il n’est pas question de déportation ou de camps d’extermination mais de la Shoah par balles dont l’ampleur n’a été découverte qu’assez tardivement. Leur démarche est un mélange de quête des origines et de volonté de représenter l’après-coup de la Shoah et la transmission du trauma qu’elle a provoqué. La conscience de l'anéantissement du Yiddishland et du vide ainsi créé est perceptible chez les trois auteurs. Et si le manque et l’absence ont provoqué une tristesse et une nostalgie inconsolables, la présence à la fois proche et lointaine du Yiddishland semble avoir permis à une certaine judéité d’émerger : la Shoah apparaît comme une sorte d’événement "fondateur" et son après-coup a ravivé le sentiment identitaire des auteurs.