7 septembre 2006
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Antoine Pelicand, « Juge de paix, juge de proximité : les métamorphoses d'un profane judiciaire », HAL-SHS : droit et gestion, ID : 10670/1.xh6bnx
En écho au discours de bien des acteurs du monde judiciaire, un certain nombre de travaux, indigènes ou extérieurs, insistent sur le processus de "désacralisation" qui toucherait la Justice. Pourtant, si l'on se concentre sur l'une des frontières de l'institution, à savoir le travail de régulation des petits conflits, nombreux par le nombre, mais dépréciés dans la sphère judiciaire par la banalité de leur objet et leur forte similitude, la simple idée d'une sécularisation s'avère incapable d'expliquer certains phénomènes. Alors que les juges de paix ont été, jusque dans l'entre-deux-guerres, fortement intégrés dans l'appareil judiciaire, l'introduction actuelle de "juges de proximité", pourtant dotés, à la différence de leurs prédécesseurs, de connaissances juridiques, est vécue par le monde judiciaire comme l'incursion de "profanes". Plus encore, pourquoi apparaît-il aujourd'hui dangereux de réinstaurer un dispositif judiciaire issu d'une époque si promptement regrettée par les acteurs de la justice, portés à la nostalgie ? D'où la nécessité d'analyser le paradoxe voulant qu'une justice présentée aujourd'hui comme désacralisée se permet de crier à l'hérésie. En s'appuyant sur les pratiques changeantes de ces juges exerçant en marge de l'institution, sur les évolutions perceptibles quant à leur recrutement, il est possible de retracer les transformations au cours du siècle des perceptions de la sacralité en justice. Plutôt que de croire en une pure perte, ne s'agit-il pas plutôt d'un transfert de "sacralité" accompagnant les mutations de la légitimité politique de ces " petits juges " ?