2021
Cairn
Corinne Denoyelle, « La réalisation de l’excuse en moyen français : une recherche en pragmatique historique », Travaux de linguistique, ID : 10670/1.xhhd7p
L’acte de langage de l’excuse semble moins fréquent au Moyen Âge qu’à notre époque. Le changement des réalisations de l’excuse ainsi que le changement des conditions pragmatiques de sa production témoignent d’une évolution d’une politesse positive à une politesse plus négative, et vers une société moins hiérarchisée, dans laquelle l’excuse peut désormais être réciproque et ne s’exerce plus uniquement de l’inférieur vers le supérieur. Trois réseaux lexicaux structurent la demande de pardon, à divers degrés d’intensité. Ils permettent de réaliser des actes de langage destinés à rétablir l’harmonie entre offenseur et offensé et leur récurrence signale leur dimension rituelle : (1) autour du verbe desplaire, c’est-à-dire « ne vous desplaise », ou plus rarement, chaloir, ennuyer ou courroucer, employés sous forme négative, qui visent à apaiser l’offensé ; (2) autour du verbe excuser relativement peu employé sous forme performative, mais qui entre dans des constructions formulaires du type « tenez moi ou ayez moi pour excusé » ; (3) autour du verbe pardonner, qui renvoie explicitement à une demande de pardon chrétienne. Ces verbes sont utilisés un peu différemment selon une gradation qui va de l’excuse la plus faible et la plus conventionnelle – verbe déplaire – à l’excuse la plus forte, autour du verbe pardonner.