2023
Cairn
Joëlle Vailly, « Identifier, connecter, localiser : La bio-identité des suspects génétiques en Europe », L'Homme, ID : 10670/1.xrge3u
La circulation des données génétiques et des informations sur les suspects d’infractions pénales se développe en Europe. Dans quelle mesure les pratiques sociales de la génétique dans le contexte policier et judiciaire européen transforment-elles ce que les anthropologues appellent, le plus souvent pour l’appliquer au domaine médical, la « bio-identité », lorsque celle-ci concerne les suspects d’infraction ? Des campagnes d’entretiens avec des policiers et des gendarmes ainsi que l’étude d’affaires pénales permettront de dégager trois rôles possibles de l’A dn dans ce contexte : l’identification des personnes, la connexion entre des dossiers pour des infractions mineures et, dans une moindre mesure, la localisation des suspects. Les bio-identités de suspects qui s’en dégagent relèvent à la fois des vies biologiques anonymes (dans le registre de la comparaison) et des sujets individuels (dans le registre de la caractérisation), qui passent parfois du domaine délictuel au domaine criminel par le biais de l’A dn. Plus généralement, le rôle prépondérant donné à la police sur la justice en Europe facilite globalement la mobilité des informations et la constitution d’une bio-identité de suspects continentaux, à la fois étendue et durable. En somme, en proposant un déplacement du domaine médical au domaine pénal, des associations de malades aux rapports entre police et justice, l’analyse sous l’angle des bio-identités donne la possibilité d’examiner à nouveaux frais l’articulation entre la vie biologique et la vie sociale.