2006
Cairn
Céline Bayou et al., « Populisme et extrémisme en Europe centrale et balte », Le Courrier des pays de l'Est, ID : 10670/1.xs140i
Phénomène polymorphe s’il en est, le populisme est présent, aujourd’hui comme hier, dans le discours de nombre de formations politiques, de droite comme de gauche, à l’Est comme à l’Ouest. Entre la rhétorique nationaliste de l’Alliance des jeunes démocrates (FIDESz) de la droite hongroise et les harangues du leader de Samoobrona (Autodéfense), ancien syndicat paysan polonais devenu parti politique, le principal point commun est la présentation simplifiée à outrance des difficultés économiques et sociales et des solutions proposées pour les résoudre, dans des pays tout juste sortis du trauma de la transformation post-com-muniste. Mais avec un concept aux contours aussi imprécis, comment aborder, pour comprendre leur impact, ces formations qualifiées de populistes, terme d’emblée stigmatisant ? En Pologne, Lettonie, République tchèque, Slovaquie, Slovénie et Hongrie, les auteurs ne peuvent que constater la grande diversité de leurs cibles et de leurs programmes et évaluer grossièrement leur incidence sur la vie politique, à l’aune de leur participation fluctuante à la compétition électorale. Partis populistes et/ou extrémistes alimentent leur rhétorique à plusieurs sources, dont les plus évidentes sont de l’ordre du ressentiment, de la marginalisation et de la frustration. (Ré)apparaissent ainsi des replis et crispations identitaires, comme en Hongrie, qui ne s’est pas remise de l’amputation de son territoire et «transfère» en quelque sorte ce sentiment par le biais de la défense des «Hongrois de l’étranger», ou comme la Slovénie ou la Lettonie, dont l’indépendance fraîchement acquise ou recouvrée rend les populations ultra-sensibles sur la défense de leurs origines et de leur territoire. Crispations sociales aussi, pour certaines catégories de personnes s’estimant appauvries, lésées et marginalisées dans le nouveau système, et pour lesquelles l’intégration à l’UE n’offre pas d’espoir de changement à court et moyen termes. Le risque est le rejet (déjà patent à petite échelle), avec celui de l’intégration économique, des valeurs européennes elles-mêmes, le vide étant alors comblé par le retour des vieux démons xénophobes, racistes et nationalistes.