2014
Cairn
Guy-Olivier Faure, « Le « troc à la muette » : une forme première de négociation », Négociations, ID : 10670/1.y6psfj
Si toute négociation ne peut s’affranchir de communication, cette dernière n’implique pas inévitablement des échanges verbaux entre les parties. La nécessaire convergence peut être réalisée par d’autres moyens, notamment par la mise en œuvre d’un processus incrémental d’ajustement. Cet article analyse comment certaines parties, dans un contexte de défiance mutuelle, voire d’hostilité réciproque, peuvent néanmoins parvenir à un accord. Ce type de négociation connu sous l’appellation de « troc à la muette » ( dumb barter) est en lui-même un paradigme doté d’une rationalité spécifique. Il est caractérisé par une asymétrie du rapport de forces, des différences culturelles majeures et enfin une difficulté logistique extrême pour atteindre le lieu physique de l’échange dans le cadre d’un processus à haut risque. Parfois appelé « échange silencieux », ce type de transaction a pu être observé dans différents endroits de la planète, notamment en Afrique de l’Ouest, et ce pendant plus de deux millénaires. Encore pratiqué de nos jours en certains lieux, il s’agirait du plus vieux mode d’échange connu à ce jour. Ce troc improbable mais qui a fait la preuve de son efficacité dans la longue durée permet de projeter un éclairage singulier sur la nature même de la négociation.