2003
Cairn
Thomas Loué, « L'apologétique de Ferdinand Brunetière et le positivisme : un bricolage idéologique « généreux et accueillant » », Revue des sciences philosophiques et théologiques, ID : 10670/1.y8g0tu
En taxant le travail apologétique de Ferdinand Brunetière d’« accueillant et généreux», le théologien Edgar Janssens reprenait, en des termes moins dévalorisants, l’idée développée par Charles Maurras selon laquelle les constructions théoriques du directeur de la Revue des Deux Mondes étaient intellectuellement des plus fragiles. Du reste, la grande majorité des philosophes et théologiens qui évaluèrent l’apologétique de Brunetière restèrent dubitatifs devant cette tentative de convoquer la philosophie d’Auguste Comte pour la défense du catholicisme. Pourtant, Brunetière s’insérait dans un mouvement plus vaste de rapprochement de certains courants intellectuels catholiques avec le positivisme dans les années 1890-1900. Des deux aspects essentiels de cette apologétique, l’un épistémologique et l’autre sociologique, c’est le premier qui suscita pour l’essentiel les réserves des intellectuels catholiques. En effet, en pleine crise moderniste, il était difficile, comme le faisait Brunetière, de mettre en avant une théorie relativiste de la connaissance et de baser les conditions de possibilité de la science sur l’Inconnaissable de Spencer. Mais la logique de Brunetière n’était pas celle des théologiens. Sa stratégie d’occupation de l’espace public, les modalités de sa gestion des polémiques ne pouvaient s’éloigner d’un certain nombre de références communes avec ceux-là mêmes qu’il entendait combattre.