17 janvier 2022
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Rafaël Cos et al., « D’une crise à l’autre : les nouvelles interdépendances entre l’État et la finance globale.: Entretien croisé avec Daniela Gabor, Frédéric Lebaron, Wolfgang Streeck », HAL-SHS : sociologie, ID : 10.3917/crii.094.0174
Un peu plus de dix ans après la crise de 2008, cette place de la finance interroge : comment cette dernière se retrouve-t-elle aujourd’hui au cœur des dispositifs d’action publique quand, il y a encore si peu de temps, elle était mise au banc des accusés pour avoir été à l’origine de la plus grave crise économique observée depuis le krach de 1929 ? Comment la finance est-elle passée du statut de « problème » à résoudre à celui de solution pour gouverner les crises ? Dès lors, comment les rapports entre les États et la finance se sont-ils déplacés depuis 2008 ? Et dans quelle mesure contribuent-ils à recomposer les ordres politiques et sociaux ? Dans cet entretien croisé, nous présentons trois éclairages sur ce nouvel âge de la financiarisation – celui de l’économie politique hétérodoxe (Daniela Gabor), celui de la sociologie néo-institutionnaliste (Wolfgang Streeck) et celui de la sociologie critique (Frédéric Lebaron). Daniela Gabor propose la notion de « derisking state » pour penser les techniques inédites par lesquelles l’État ouvre, depuis 2008, de nouveaux espaces de la vie sociale à la finance, en transformant ces espaces en classes d’actifs, et en réduisant le risque pour les investisseurs. Wolfgang Streeck insiste sur les transformations du consolidation state, dans lequel les marchés fonctionnent comme un outil de disciplinarisation de la dépense publique, tandis que leur stabilité dépend elle-même de la dette des États. Enfin, Frédéric Lebaron montre que ces nouvelles interdépendances entre États et investisseurs privés ne peuvent se comprendre sans analyser la dynamique singulière par laquelle les banques centrales s’affirment au sein des champs du pouvoir. Ce faisant, nous offrons une palette d’outils pour déchiffrer les transformations politiques et sociales qui se jouent aujourd’hui dans les réassemblages entre les États, les banques centrales et la finance.