2 mars 2021
Pierre Péfau, « Construire dans les agglomérations gauloises : l'architecture des bâtiments du Second âge du Fer en Gaule interne, approche technique et socio-économique », HAL-SHS : architecture, ID : 10670/1.zgoe4e
L’étude des bâtiments en terre et bois des agglomérations du Second âge du Fer (IIIe-Ier s. av. n. è.) de Gaule interne (hors littoral méditerranéen) a permis de construire une réflexion autour de deux thématiques de recherche à la fois peu investies et complémentaires. Si les travaux réalisés depuis la fin des années 1970 ont considérablement amélioré nos connaissances sur les constructions de l’habitat rural dispersé, notre perception de l’architecture des habitats groupés reste largement incomplète. Par ailleurs, ces agglomérations (oppida et agglomérations ouvertes) ont été examinées et définies au travers de nombreux sujets et objets d’étude (fortifications, productions artisanales, échanges et commerce, analyses territoriales, etc.), mais l’architecture des bâtiments n’a que rarement été mobilisée, alors qu’elle est une clé de lecture essentielle à l’analyse des interactions techniques, environnementales, sociales, économiques, politiques et culturelles animant les sociétés anciennes. Les nombreux débats concernant la caractérisation de ces habitats agglomérés et leur éventuel statut urbain m’ont ainsi amené à développer une approche croisée dans le cadre de ce doctorat. L’objectif a donc été de contribuer à une meilleure compréhension du phénomène d’urbanisation et des caractéristiques des agglomérations à travers une étude fine de l’architecture, permettant de préciser dans quelle mesure les formes architecturales sont révélatrices mais également vectrices de dynamiques socioéconomiques particulières.L’étude technique de 339 bâtiments, provenant de 39 agglomérations aux statuts, activités, chronologies et contextes géoculturels variés, s’est appuyée sur une méthodologie rigoureuse et originale. Celle-ci combine l’analyse des divers types de vestiges architecturaux (sols, creusements et négatifs, empreintes de sablière basse, bois conservés, terre à bâtir, liaisons métalliques, etc.) et des dynamiques taphonomiques, avec une approche comparative à grande échelle, intégrant à la fois la documentation archéologique et ethnographique. Si une grande partie de ces constructions est constituée de poteaux plantés (module porteur avec ou sans parois rejetées, poteaux rapprochés dans des parois porteuses), une place privilégiée a été accordée aux architectures en pan de bois et à l’usage de pièces de contreventement obliques : longtemps considérées comme des innovations tardives, attribuées à l’Antiquité, il est désormais avéré que ces techniques font partie intégrante du spectre architectural de l’âge du Fer, avec un développement particulièrement visible à partir des IIIe-IIe s. av. n. è. Ces traditions architecturales ont ensuite été intégrées dans une recherche plus globale, considérant à la fois l’organisation spatiale des agglomérations, les usages des bâtiments et les statuts sociaux de leurs occupant·e·s, ainsi que les différences entre l’architecture rurale et celle des habitats groupés. Un modèle interprétatif, tenant compte du contexte environnemental et de toute la complexité des agglomérations de la fin de l’âge du Fer, a ainsi été proposé. Une partie au moins de ces habitats groupés serait caractérisée par la mise en oeuvre d’économies et de gestions rationnelles du bois d’oeuvre et de la construction, par le développement de réseaux d’artisans spécialisés (charpentiers ?) ainsi que par des adaptations des modèles architecturaux à l’urbanisme et au degré d’urbanisation.