Neurosciences et psychiatrie : intégration ou grand écart ?

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2009

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Nicolas Georgieff, « Neurosciences et psychiatrie : intégration ou grand écart ? », L'information psychiatrique, ID : 10670/1.zlyyim


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Si les recherches neuroscientifiques en psychiatrie, portant principalement sur les pathologies, ont progressé de manière très remarquable, un écart encore considérable sépare les données de ces recherches et la pratique quotidienne. Si toutes les pratiques en psychiatrie s’inscrivent au niveau biologique et cérébral exploré par les neurosciences, certaines pratiques agissent directement sur le fonctionnement cérébral pour le modifier (stimulation, médicament) et s’appuient donc sur la biologie et les neurosciences, alors que les autres n’atteignent cette modification qu’indirectement, à travers des interactions intentionnelles entre le praticien et le patient. L’« écart biologico/pratique » peut être compris comme la conséquence d’un écart de complexité entre le plan des processus pathologiques et des pratiques interpersonnelles (sur lesquelles repose largement la pratique psychiatrique), et le plan des mécanismes cérébraux et biologiques étudiés aujourd’hui. Mais il peut aussi être vu comme l’expression d’une différence de nature entre les connaissances issues de la pratique intersubjective et de la recherche objective, différence assimilable à la distinction classique entre compréhension et explication, appliquée ici au comportement ou à la « conduite » au sens classique. Il en découlerait alors la nécessité constante pour la psychiatrie de continuer à se référer aux sciences cliniques ou « humaines » en même temps qu’aux neurosciences. Méconnaître cette distinction conduit à différents réductionnismes, biologique ou psychologique. Réduire l’écart entre neurosciences et pratique clinique suppose de reconnaître cette nécessaire pluridisciplinarité de la psychiatrie, et de faire porter les recherches neuroscientifiques non seulement sur les pathologies mais aussi sur les pratiques cliniques. Une « neuroscience de la pratique clinique » aiderait à adapter celle-ci aux situations où le fonctionnement cérébral est altéré, comme souvent en psychiatrie. Elle permettra aussi de considérer la part intersubjective forte propre à la pratique psychiatrique non plus comme un biais à éliminer dans les protocoles de recherche, mais comme une réalité propre, à la fois psychologique et neurobiologique, un objet de recherche neuroscientifique en psychiatrie de premier intérêt. L’évolution des neurosciences cognitives dans le champ de l’intersubjectivité (les « neurosciences cognitives sociales ») offre une remarquable opportunité pour étudier non seulement la pathologie, mais aussi la pratique psychiatrique, de ce point de vue centré sur les mécanismes biologiques des relations interpersonnelles.

Neurosciences and psychiatry: the wide gapAlthough neuroscientific research in psychiatry, primarily concerning pathologies, have progressed in a very remarkable manner, a considerable gap still exists between the results of this research and every day practice. If all psychiatric practices were only a part of the biological and cerebral level explored by the neurosciences, certain practices would only involve direct action on the brain function in order to make modifications (i.e. stimulation, medication etc.) whereas others would only reach this modification indirectly via the intentional interaction between the practitioner and the patient. The “biological/practical gap” may be understood as the consequence of a complexity gap between the basis of the pathological process and interpersonal practices (on which psychiatric practice largely rests) and basis of brain and biological mechanisms that are studied today. However, this may be viewed as an expression of the difference of nature between knowledge which originates from intersubjective practice and objective research, a difference similar to the classic distinction between comprehension and interpretation, here applied to behaviour or to “drive” in the classical sense. There will be a constant necessity for psychiatry to continue to refer to clinical sciences or “human” at the same time as neurosciences. To misinterpret this distinction would lead to different biological or psychological oversimplifications. Narrowing the gap between neurosciences and clinical practice supposes the necessity of the multidisciplinary of psychiatry and to concentrate research not only on pathologies but also on clinical practice.

ResumenSi la investigación neurocientífica en psiquiatría, principalmente centrada en las patologías, han avanzado de manera muy notable, una distancia aún importante media entre los datos de dicha investigación y la práctica cotidiana. Si bien todas las prácticas de la psiquiatría se inscriben a nivel biológico y cerebral explorado por las neurociencias, algunas prácticas actúan directamente en el funcionamiento cerebral para modificarlo (estímulo, medicamento) y se ayudan pues con la biología y las neurociencias, mientras que otras solo indirectamente alcanzan esta modificación, mediante interacciones intencionales entre el profesional y el paciente. La « distancia biológico-práctica » puede comprenderse como la consecuencia de una distancia de complejidad a nivel de los procesos patológicos y unas prácticas interpersonales (en las que se basa ampliamente la práctica psiquiátrica), y a otro nivel los mecanismos cerebrales y biológicos estudiados en la actualidad. Pero también puede verse como expresando una diferencia de índole entre los conocimientos surgidos de la práctica intersubjetiva con la investigación objetiva, diferencia asimilable a la tradicional distinción entre comprensión y explicación, aplicada aquí al « comportamiento » o a la « conducta » en su sentido clásico. De ello se derivaría pues la permanente necesidad para la psiquiatría de seguir refiriéndose a las ciencias clínicas o « humanas » a la vez que a las neurociencias. Desconocer esta distinción aboca a diferentes reduccionismos, biológico o psicológico. Reducir la distancia entre neurociencias y práctica clínica supone reconocer esta necesaria pluridisciplinaridad de la psiquiatría, y centrar la investigación neurocientíficas no solo en las patologías sino también en las prácticas clínicas. Una « neurociencia de la práctica clínica » ayudaría a adaptarla a las situaciones en las que el funcionamiento cerebral está alterado, como suele ocurrir en psiquiatría. También ayudará a que se considere la parte intersubjetiva grande, propia de la práctica psiquiátrica ya no como un procedimiento que hay que eliminar en los protocolos de investigación, sino como una realidad propia, a la vez psicológica y neurobiológica, un tema de investigación neurocientífica en la psiquiatría de sumo interés. La evolución de las neurociencias cognitivas en el ámbito de la intersubjetividad (las « neurociencias cognitivas sociales ») brinda una señalada oportunidad para estudiar no solo la patología sino también la práctica psiquiátrica desde este punto de vista centrado en los mecanismos biológicos de las relaciones interpersonales.

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