6 octobre 2016
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Sébastien Saetta, « Inciter des auteurs d’infractions à caractère sexuel incarcérés à se soigner », Champ pénal/Penal field, ID : 10.4000/champpenal.9401
La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, qui a introduit en France l'injonction de soin à la place ou en complément d'une peine d'emprisonnement ferme, a également introduit la notion d'« incitation aux soins » pour les auteurs d'infractions à caractère sexuel incarcérés. Ces derniers sont regroupés au sein d'établissements pénitentiaires spécifiques disposant notamment d'une unité de soins spécialisée. Dans cet article, sont d'abord décrits et analysés les dispositifs et stratégies par lesquels le législateur, les juges, le personnel pénitentiaire et les thérapeutes de cet établissement et de cette unité s'y prennent pour amener cette catégorie de détenus – a priori peu enclins à demander des soins – dans le bureau des thérapeutes. Y sont ensuite décrites et analysées les techniques mobilisées par ces derniers pour modifier le fonctionnement psychique des détenus, et les amener à réfléchir sur eux, à manifester de l'empathie et à comprendre le sens des interdits. La médicalisation des auteurs d'infractions à caractère sexuel, entre « gestion des risques » et « tutelle de l'intime », constitue ainsi une forme de socialisation autoritaire, les thérapeutes participant à la fabrique d'un sujet contemporain enjoint de travailler sur lui et renvoyé à lui-même dans la gestion de ses désirs et comportements.