1991
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Politique ; no. 20 (1991)
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François Rocher et al., « Charte et société : vers un nouvel ordre politique canadien? », Politique, ID : 10.7202/040698ar
L’enchâssement de la Charte des droits et libertés dans la Constitution canadienne est généralement perçu comme une avancée politique importante dans l’histoire du pays. Presque toutes les analyses s’accordent pour conférer à la Charte des vertus démocratiques qui devraient nécessairement conduire à la mise en place, au Canada, d’un contrat social plus flexible et plus ouvert. Rares sont les analyses qui tentent plutôt d’en évaluer l’impact social réel ou de saisir le sens de l’ordre politique nouveau qu’elle impose inévitablement. Le présent texte veut commencer à rectifier cette lacune en proposant les éléments d’une problématique d’interprétation de la Charte canadienne des droits et libertés à la lumière des mutations sociales et économiques qui, depuis les années 1970, ont conduit à l’instauration d’un nouvel ordre politico-administratif au Canada. Les auteurs soutiennent qu’en insistant sur les droits individuels, la Charte neutralise la mouvance collectiviste et sociale-démocrate instituée par l’État-providence et tend à banaliser le contenu conflictuel des rapports sociaux. Sans le savoir, les formulateurs de la Charte ont peut-être posé, pour l'an 2000, les jalons d’une profonde crise de la gouverne et de la légitimité.