2010
Ce document est lié à :
TTR : Traduction, terminologie, rédaction ; vol. 23 no. 2 (2010)
Tous droits réservés © AndaRădulescu, 2010
Anda Rădulescu, « Entre censure et autocensure littéraire en Roumanie : L’odyssée d’un journal intime à l’époque communiste », TTR: Traduction, terminologie, rédaction, ID : 10.7202/1009159ar
Nous nous proposons d’étudier les manifestations de censure et d’autocensure dans le journal intime du professeur Paul Miclău rédigé et initialement traduit à l’époque du totalitarisme communiste en Roumanie. Ce journal a connu une histoire hors du commun. Voulant se protéger des autorités censurantes, Paul Miclău l’a tout d’abord écrit en français en 1985. Ensuite, afin de le faire publier sous le régime communiste (en 1989), il l’a traduit en roumain et a dû le censurer. La version roumaine intégrale n’a été publiée que tardivement, en 1994. De même, l’original français n’est paru en France qu’en 1995. Miclău explique que la censure et l’appareil de répression sur lequel elle s’appuyait ont amoindri son autorité en tant qu’auteur du texte. De sa propre initiative ou sur le conseil d’autrui, il a dû retirer de l’original certains mots ou fragments de longueur variable pouvant choquer les autorités. De plus, la censure officielle coupait ou supprimait des paragraphes entiers portant sur certaines réalités d’ordre politique, social, économique, religieux ou sexuel que les autorités communistes considéraient comme irrecevables lorsqu’insuffisamment atténuées. Une comparaison de l’original écrit en français et de l’autotraduction intégrale en roumain avec la première autotraduction produite en Roumanie à la fin des années 1980 permet de constater que l’autorité de Paul Miclău en tant qu’auteur avait été amoindrie, puisqu’il lui a fallu réécrire son oeuvre en tenant compte du contexte censurant qui en a autorisé la publication. Or, quoique diminuée, cette autorité n’avait pas été éliminée.