2016
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Meta : Journal des traducteurs ; vol. 61 (2016)
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Marie-Alice Belle, « “Mysteries divulged”: Philemon Holland’s Paratexts and the Translation of Pliny’s Natural History in Early Modern England », Meta: Journal des traducteurs / Meta: Translators’ Journal, ID : 10.7202/1038686ar
Le présent article vise à replacer la traduction de l’Histoire Naturelle de Pline l’Ancien par Philemon Holland (1601) dans le contexte de l’histoire des sciences en Angleterre. Alors que la critique a traditionnellement abordé la traduction de Holland sous l’angle de la réception des grands classiques antiques, du développement d’une rhétorique de la traduction en Angleterre, ou encore de la « défense et illustration » de la prose vernaculaire anglaise, on se penche ici sur les stratégies discursives et paratextuelles déployées par Holland dans sa traduction des livres de l’Histoire Naturelle traitant de botanique et de médecine. En reprenant et élargissant la définition des paratextes offerte par Genette comme des espaces liminaires où l’auteur – ou en l’occurrence le traducteur – cherche à se mettre en scène et à contrôler les modalités de lecture de l’oeuvre, on explore ici les différents aspects du projet de traduction de Holland visant à « divulguer les mystères » de la botanique médicinale de Pline à un lectorat élargi. Alors que les préfaces aux deux volumes de la traduction rassemblent sous un même discours de l’utilitas le lectorat hétéroclite ostensiblement visé par Holland (écoliers, lecteurs profanes, mais aussi érudits et médecins), une lecture plus fine des notes marginales dans les livres XIX à XXVII de la traduction montre aussi le souci du traducteur d’intégrer la tradition européenne de commentaire érudit dénonçant les erreurs factuelles, herméneutiques et méthodologiques entachant le projet encyclopédique de Pline. On suggère ici que la tension ainsi créée entre texte et paratexte, et entre les préfaces et les autres formes d’inscription paratextuelle à l’oeuvre dans la traduction de Holland, reflète les mutations profondes que connaissent les milieux humanistes et scientifiques anglais dans leur rapport à la science antique et leur conception même de la nature du savoir scientifique à l’aube du XVIIe siècle.