info:eu-repo/semantics/OpenAccess
Yoluène Massey et al., « ELAMAY Durabilité des biens communs: le cas des élasmobranches à Mayotte », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.283549...
Ce rapport vise en s’appuyant sur une revue de la littérature scientifique et un travail approfondi d’enquêtes de terrain auprès des acteurs du Parc Naturel Marin de Mayotte ainsi que des pêcheurs, complété par l’analyse de données de débarquements, à rendre compte de la diversité des élasmobranches (raies et requins) présents et connus dans les eaux mahoraises, et des interactions et connaissances actuelles des pêcheurs relatives à ce groupe. A travers des entretiens exploratoires et semi-directifs, nous avons collecté des informations sur les connaissances locales sur l’écologie des élasmobranches, sur les pratiques liées à leur exploitation et leur valorisation, ainsi que sur la perception de l’évolution de leur abondance. Nous avons croisé ces données avec des données de débarquement de pêche collectées par le SIH (Système d’Information Halieutique) entre 2015 et 2023 afin d’identifier des patrons de connaissances communes. Dans ce rapport, nous mettons en évidence que les élasmobranches occupent une place importante dans la culture locale des communautés de pêcheurs à Mayotte, aussi bien dans leurs activités quotidiennes que dans leur vie familiale et leur imaginaire collectif. Les raies sont rarement capturées par les petites embarcations à Mayotte. Bien que ce ne soit pas révélé dans les données de débarquement du SIH, les requins figurent eux parmi les captures de pêche courantes à Mayotte. Ces dernières sont majoritairement considérées comme indésirables en raison des désagréments qu’elles provoquent (endommagement du matériel de pêche, perte de temps, déprédation). Bien que la majorité des pêcheurs indiquent débarquer du requin plusieurs fois par an, leur rétention n’est pas systématique en raison de plusieurs facteurs, notamment leur statut d’espèces à faible valeur commerciale. Certaines zones, comme le banc de l’Iris, connu localement sous le nom de Mtsamboro, ont été identifiées comme présentant une forte abondance de requins. Certaines espèces d’élasmobranches bénéficient d’un statut particulier, notamment de protection, auprès des pêcheurs locaux. Les perceptions des pêcheurs quant à l’évolution des populations de requins diffèrent selon leur ancienneté dans la pêche à Mayotte : les plus expérimentés rapportent une diminution des populations, tandis que les moins expérimentés estiment qu’elles ont augmenté. Par ailleurs, les élasmobranches occupent une place importante dans la culture locale; d’une part dans la culture culinaire avec certains plats traditionnels tels que le matsango, toujours très appréciés. D’autre part, ils sont porteurs d’une dimension spirituelle forte et jouent encore un rôle dans les rites de naissance et la médecine traditionnelle, bien que ces pratiques tendent à s’effacer progressivement. Ce rapport qui apporte de nouvelles connaissances sur les élasmobranches et les relations contemporaines que les pêcheurs entretiennent avec ces derniers interroge également l’intérêt d’impliquer davantage ces acteurs dans les études scientifiques et dans la production et l’ajustement des politiques environnementales.