Être ou ne pas être débordé : l’apprentissage informel du rapport au temps des enseignantsdu collège

Résumé Fr

Alors que les enseignants du collège en France travaillent en moyenne 20h en classe par semaine, 21h du travail hebdomadaire s’effectue en dehors de la classe (Insee, 2010). Cette proportion entre le travail « posté » et le travail « libre » (Lantheaume et Hélou, 2008) génère le sentiment, pour les enseignant, de pratiquer un métier jamais finalisé, qui tend à envahir les autres sphères de la vie (Bouchetal et Lantheaume, 2015). A ce sujet, notre enquête par questionnaire menée auprès de 485 professeurs du collège ainsi que la réalisation de 25 entretiens, donne à voir des perceptions du « coût social » du métier très différentes d’un professeur à un autre. Ainsi les uns, débordés, parlent de réelles difficultés à « couper », à cesser de travailler ou de penser au travail, rendant la vie privée parfois difficile ; quand d’autres parlent d’une situation professionnelle confortable, qui, au contraire, favorise le temps libre et facilite l’organisation de la vie familiale et/ou personnelle. L’objectif de cette communication est, par conséquent, d’interroger cette hétérogénéité dans les manières de vivre le temps dans le travail enseignant, en posant l’hypothèse de l’existence d’une forme d’apprentissage de la disposition à rompre avec le travail, à délimiter les temporalités, à maintenir une distance entre vie professionnelle et vie privée.En explorant ainsi la dimension transmissible du « savoir-être temporel », des phénomènes d’apprentissage de capacités temporelles seront mis au jour à travers trois dimensions. Les résultats montrent, dans un premier temps, que le milieu socioprofessionnel d’origine des enseignants est révélateur de formes d’héritage dans la capacité organisationnelle et gestionnaire du temps. Dans un deuxième temps, il sera question du parcours des enquêtés : au regard des résultats, tout se passe comme si une forme d’apprentissage incorporé de compétences temporelles s’exerçait via l’expérience de gestion des temporalités, que l’on retrouve notamment dans la pratique l’activités variées durant la scolarité des enquêtés. Enfin, la formation des enseignants sera abordée, ce qui soulèvera une discussion sur la spécificité temporelle du travail enseignant et sur l’éventuelle nécessité de penser l’apprentissage du métier en ce sens.